« Se vendre », le tabou des femmes

A l’aube de vos achats frénétiques pour les fêtes, je souhaite questionner la position de la femme que je suis et qui fait surement écho chez plusieurs de mes consœurs, en particulier de mes consœurs auteures. Comment se vendre ? Oser se vendre ? Est-ce de la prostitution ? Vendre quoi et surtout QUI ? Descriptions du marché du livre et idées : l’auteure peut-elle se vendre LOCAL ?

VENDRE, SE VENDRE, un terrible viol

Le mot fait frémir la femme que je suis. Se vendre, est un mot qui résonne associé au viol, à la soumission, à l’esclavage, à la prostitution. Se vendre au féminin est une longue histoire de non-indépendance. Et le temps n’est encore pas si lointain où les femmes écrivaines se dotaient d’un nom masculin ou même était spoliée par leurs homologues auteurs (Colette en est un exemple). Se vendre, soi-même, comme femme, peut s’entendre comme un signe de faiblesse, comme si on ne pouvait plus « faire autrement » que de se vendre, puisque les autres ne nous offrent pas leur soutien. Aie… entendez-vous le paradoxe et l’ombre qui se dessine, parfois très inconsciemment chez les femmes auto-entrepreneuses ? Alors que le contexte actuel est exactement le contraire: nous vendons nos créations PAR VALEUR ET PAR FIERTÉ.

Le marché grand public, le marché local

Comme moi, mes livres et mes oracles sont édités dans une grande maison d’édition. A côté de ceux-ci j’ai également édité un livre et un oracle en auto-édition. Je connais donc ces deux marchés.

L’historique d’un livre est très rapidement tracé: vous travaillez un an, parfois même deux, sur un livre qui parait enfin en librairie. Sur les étagères des grandes surfaces, chez votre libraire, vous pourrez donc trouver les ouvrages durant… 3 semaines et 3 mois tout au plus. Puis, une rotation s’opère afin de favoriser la sortie d’autres auteur.es et vos livres retournent à l’éditeur.

Si vous venez en librairie en indiquant mon nom ou le titre du livre que vous recherchez, vous pourrez aisément le commander. Faut-il le connaître ! En librairie ou dans vos magazines, journaux, émissions de télévision spécialisées, vous ne serez appelé.es à ne voir que ceux qui font de gros tirages. L’industrie du livre ou du disque fonctionne de la même manière: miser sur ceux qui vendent pour vendre davantage.

La publicité coûte excessivement cher ! La moindre annonce vous fait débourser plusieurs centaines de francs ou d’euros, alors imaginez les sommes en jeu pour les grandes parutions ! Ni l’éditeur ni l’auteure ne peut se « payer » cette visibilité, à moins d’avoir déjà engrangé de substantiels bénéfices.

En résumé, même si votre auteure préférée parait chez un éditeur, son travail de diffusion reste intense et une grande partie de son travail va être de prolonger ce que l’éditeur offre sur un court terme.

C’est là qu’on peut se la jouer LOCAL

La diffusion locale n’est pas que pour les agriculteurs ou les apiculteurs de votre région 😉 , mais aussi pour l’auteure: rechercher le contact direct, la diffusion de bouche à oreille, le panier hebdomadaire des recommandations utiles, le réseautage des bonnes adresses. Pour cela, l’auteure a différents moyens dont celui dont j’use aujourd’hui pour vous écrire:

  • contacter son réseau par newsletter – il ne touchera toujours que les mêmes personnes
  • réseauter sur les médias sociaux qui, comme leurs noms l’indiquent permettent de réseauter plus loin, donc de toucher un public encore inconnu
  • créer des évènements de proximité – ateliers, lectures en public, conférences thématiques avec des dédicaces (moment des plus précieux – enfin, moi, j’adore ce contact, la contextualisation de la relation avec le livre), des présentations lors de festivals ou des salons (de plus en plus inaccessibles pour les auto-éditions)

Se la jouer LOCAL, c’est oser demander de jouer le jeu du réseau. C’est oser « se vendre » et affirmer:

  • ce que je crée a de la valeur
  • ce que je crée vous intéresse, vous enrichit intellectuellement et culturellement
  • ce que je crée se vend et n’est pas gratuit, car c’est mon métier et je vis de mon métier. (Entendez très précisément: je paie mes factures;)

C’est aussi affirmer qu’en connaissance de cause, vous savez à présent que si je vous invite à acheter mes ouvrages, c’est que seul le réseautage le permet. Alors oui… j’utilise les réseaux. Oui, j’ai des comptes fb et instagram, non pour faire le jeu des autres, mais simplement parce que la société est inondée de produits et que mes propres ouvrages ont de la valeur. Une valeur marchande minimale, mais sans elle, l’auteure que je suis ne serait même plus édité. Je parle pour moi, mais c’est identique pour tous les auteur.es.

Se vendre au féminin

Force est de constater dans le monde de l’édition, comme dans d’autres domaines, que pour un produit quasi identique, les hommes sont sur-représentés. C’est dans leurs gênes – si je puis dire – car ils ne sont nullement « gênés » de se présenter, de se montrer, de se faire valoir. De plus, les femmes apprécient. Comme créatrice, la femme reste plus modeste. Elle recherche plus la soirée de ventes entre amies, que les grandes manifestations. Les exceptions existent et il en faudrait plus et ce, indépendamment des ventes effectives (on revient à notre point de départ). Le point fort des femmes: leur soutien. Et cet article se veut aussi être un exemple de cette entraide. Ces dernières semaines, des livres sont parus qui auront aussi besoin d’être vus localement, c’est-à-dire ouverts, découverts, lus, achetés, par vous qui partagez peut-être mes valeurs. Je vous en parle plus bas.

Édition ou auto-édition

Choix difficile, avec ses avantages et ses désavantages. Au niveau de la distribution, y a pas photo: distribuer seul.e est un terrible challenge logistique et financier. L’auteure avance l’achat de sa propre production et fait tout le job de marketing et d’envois. Au niveau valeur ajoutée, la satisfaction est de taille d’avoir été du début à la fin, au cœur de sa propre sincérité d’auteure, d’avoir défié les obstacles (nombreux !) de l’auto-édition, d’oser justement se vendre avec un mélange de fierté face au résultat obtenu et d’humilité envers les futurs lecteurs ou lectrices. Être son propre patron, faire ses choix, assumer ses erreurs et se réajuster sans cesse, est aussi une satisfaction qui résonne fort au cœur des femmes qui n’ont pas eu le droit de vote depuis si longtemps (c’est juste un exemple)…

Se faire éditer est précieux. Cela démontre que votre écriture, vos propos, votre démarche sont perçus comme intéressants, utiles, défendables (les éditeurs se battent aussi pour leurs auteurs dans la jungle du marché). Vous avez aussi une valeur marchande, puisque vous pourrez intéresser plein, plein de gens que vous rencontrez ensuite en dédicaces – et je le redis, c’est du pur plaisir ! Se faire éditer est un parcours édifiant pour l’ego. Cela ressemble aussi – pour vous faire une idée 😉 – aux lettres des chômeurs qui recherchent du job: on ne vous répond pas ou quelques lignes succinctes. Puis, lors du parcours éditorial, de nombreux aller-retours de peaufinage, réécriture, relectures, mettent les nerfs à rude épreuve.

A la veille de ces fêtes

A la veille de ces fêtes qui feront fondre votre portemonnaie, je vous invite à vous laisser inspirer par d’autres auteur.es que ceux du marketing ambiant. Retournez sur les pages ou sites d’auteur.es que vous aviez une fois apprécié.es pour découvrir leur actualité. Usez de Google pour rechercher des livres traitant de thèmes qui vous parlent vraiment et non dicté par les ventes que l’on vous propose sur les sites d’achat. N’oubliez pas: ce qui vous est montré en premier, ce sont ceux qui vendent le plus (en livres comme en musique). Lorsqu’un thème vous intéresse, n’hésitez pas à voir si une femme a aussi écrit sur celui-ci, sans être mise autant en avant.

Et puisque j’ai A CŒUR de vendre mes créations

Je vous propose quelques ouvrages qui feraient de beaux cadeaux.

En librairie ou en auto-édition

  • Rituels de femmes pour s’épanouir au rythme des saisons : un incontournable pour découvrir les particularités de chaque saison et comment vivre de simples rituels pour soi ou en groupe
  • Le petit oracle du sacré: un tout petit écrin empli de soleil et 60 cartes pour contacter le SACRE universel, à chaque instant.
  • La nature guérisseuse: une plongée poétique et chamanique dans des photos de nature sublimes et inspirantes. Des histoires de basculement intérieur qui vont enrichir votre conscience de vous-mêmes et nourrir vos aptitudes à Être.
  • En auto-édition: Le temps des ça-voirs ou comment reprendre le fil de sa sagesse intérieure. Un ouvrage philosophique, ludique et subtilement provocateur pour rester soi-même face aux injonctions de la société.

Et de prolonger ce réseautage … Sont parus chez mes consœurs:

Je vous remercie de partager cet article autour de vous et de débuter ainsi un réseautage si apprécié.

18 comments on “« Se vendre », le tabou des femmes

  1. Magnifique! C’est le travail des ombres que je fais actuellement! Merci Marianne 🙏🏽

  2. Caloz-Galley Sophie

    26/11/2023 at 21 h 11 min Répondre

    Bravo et merci Marianne!
    Je vous cite justement dans un article du journal de mon quartier arrivé ce week-end…
    Je fais régulièrement des liens, mettant en valeur les personnes qui m’inspirent.
    Je souhaite que d’autres en fassent autant pour moi…
    J’ai des attentes, souvent déçues, qui me questionnent.
    À mon sujet…
    Au sujet des autres…
    Le chemin est passionnant!
    Cordialement, Sophie

  3. Très bel article chère Marianne, merci de si bien nourrir ma réflexion d’hiver😉

  4. Merci Marianne de partager et diffuser cette sagesse au féminin. C’est inspirant !
    Douce fin d’année à toutes, femmes en chemin !

  5. Ty es tellement extraordinaire Marianne,
    Pour être passée par les mêmes chemins et sentiers que toi…
    j’approuve chacun de tes mots… MERCI pour ce texte qui devrait passer entre toutes les mains d’auteurs, d’éditeurs, de distributeurs, de libraires et de lecteurs !
    Merci du fond du cœur à toi pour me partage de mon livre « De la Terre à la lumière »…. et tous nos tissages anciens et à venir. Je t’embrasse tendrement. Marie

  6. Le thème de se vendre me parle tellement « difficilement » depuis que je bosse à mon compte… 9 ans…
    J’arrive enfin à parler de moi, de mon travail, avec confiance et fierté, mais c’était pas gagné!
    Merci Marianne de ce chemin que tu suis, de cette voie que tu traces, de ces paroles inspirantes et soutenantes.
    Même derrière un écran, quelle force que d’avoir ce réseau et ces présences.
    Et merci LES FEMMES !!! pour vos partages, votre ouverture, vos coeurs, vos richesses infinies de créatrices et d’inspiratrices.

  7. merci pour ce post!
    incroyable résonnance avec mes réflexions sur ce sujet depuis des mois! créer, est un monde, vendre en est un autre. Avoir à coeur comme tu le dis si bien, et ce à coeur est tellement souverrain!, et d’un autre côté vendre ses créations, pas celles des autres, ses propres créations donc qqchose qui sort de soi, de son être, de son corps, se vendre oui en qqsorte! ( souvent qqchose en moi chuchote  » vendre mes créations c’est faire la pute », incroyable Marianne, ce discours intérieur qui fait tout arrêter, le coeur de vendre ses créations justement) , ce tabou cet interdit qui fait s’arrêter le coeur . Houh!! quelle émotion mon Dieu

    • Marianne Grasselli Meier

      29/11/2023 at 13 h 15 min Répondre

      Merci pour ton partage, Sylvie. OUI, nous sommes rapidement prisonnière de nos propres injonctions. Allons vers plus de liberté ! bien cordialement Marianne

  8. Merci Marianne pour ton éclairage si parlant. Oui… Se vendre … Tout un chemin pour nous les femmes, tout un travail d’affirmation de soi, de sa propre valeur,… Un long chemin. Qu’il est bon de sentir cette sororité, pour contrer la loi de la competitivité, loi cruelle d’une société qui a oublié la force de la complémentarité.
    Une amie, auteure également, m’a dit un jour: te vendre, c’est permettre à celles/ceux qui ont besoin de toi de savoir que tu existes. Cela m’avait fait du bien. Je partage. Avec le Coeur.

    • Marianne Grasselli Meier

      03/12/2023 at 18 h 06 min Répondre

      Merci Alexina. Nous essayons de nous entre-aider car les injonctions sont fortes et il suffit d’un commentaire de l’un ou l’autre pour déstabiliser la confiance que nous essayons d’avoir dans nos créativités de femmes. Ce n’est qu’en nous regardant toutes avec respect, admiration, fierté réciproque que nous avancerons têtes et coeurs hauts.

  9. Merci pour cet article !
    Je me réjouis de pouvoir en lire d’autres et de faire passer le mot!

    Je vais vous écrire en mp sur Fb!

    À bientôt !

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